Née anti-A

Anéantie, on vit dans ses pantoufles. On respire le temps et le temps nous aspire. On gobe l'univers, un souffle d'ogresse. On a tout le temps, et le temps nous a. Nous assimile à. On est heureuse du pouls, de la circulation du sang, dans les veines, toujours bleues, de la respiration régulière, des poumons qui se soulèvent, des muscles qui fonctionnent encore, moins bien que le cerveau. Peut-être. On sait qu'on ne sait pas, qu'on n'a jamais rien su, ou qu'on ne sait plus.
On ronfle paisiblement, toute la vie. On fait le ménage. On n’a plus besoin de rêver. On est dans le rêve, on l'est. On sait qu'on ne sait pas. On est. On est l'anéantie, la femme absente. On a tout le temps, on a son temps, tout son temps. Le temps nous a. On sort par tous les temps, on sort.

Le sort nous a épargnée, on est l'anéantie. On a des doigts au bout des mains, palmes d'alors. L'or brille, sourire du manchot. On n’est plus couchée ni courroucée. On n’est plus tranchée ou menacée. On n’a plus honte d'être soi. On a perdu ses mots. On a tout confondu. On est née anti-A. Née ANTI-A

Comments

Anonymous said…
Beau texte... Amitiés (Isabelle "la traductrice" ;-)

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